Ondes de spin et capteurs magnétorésistifs : une rencontre nanométrique
Des physicien·nes de plusieurs laboratoires en France et dans le cadre du Programme de Recherche SPIN pour le projet ciblé SWING, ont détecté des ondes de spin à l’échelle nanométrique en les couplant à un capteur magnétorésistif opérant à très haute fréquence. Leur papier « Magneto-resistive detection of spin-waves » a été publié dans ScienceAdvances le 15 aout 2025
Les ondes de spin, que les physicien·ne·s appellent aussi magnons, sont en quelque sorte de petites vibrations à l’intérieur des matériaux magnétiques. Depuis peu, les chercheur·se·s imaginent qu’elles pourraient servir de base à de nouveaux types de circuits de traitement de l’information, appelés magnoniques. L’idée ? Profiter à la fois de la facilité avec laquelle les ondes se propagent et de la capacité naturelle des aimants à stocker de l’information. Pour que cela devienne possible, il faut réussir à relier ces ondes au monde de l’électronique : autrement dit, les transformer en signaux électriques exploitables, et cela à l’échelle nanométrique, celle qui est utilisée dans les technologies actuelles. Jusqu’ici, les techniques disponibles — comme certaines méthodes optiques ou inductives — peinaient à capter ces ondes à des échelles sub-micrométriques.
Des chercheurs et chercheuses de plusieurs laboratoires en France, parmi lesquels l’Institut de Physique et Chimie des Matériaux de Strasbourg (IPCMS, CNRS/Université de Strasbourg) et le Service de Physique de l’État Condensé (SPEC, CEA Saclay/CNRS), ont développé une méthode inédite pour détecter efficacement les ondes de spin. Leur approche consiste à placer un capteur à magnéto-résistance géante (GMR) directement sous un guide d’ondes de spin. Lorsque celles-ci se propagent à proximité, elles modifient légèrement l’aimantation d’une des couches du capteur, ce qui entraîne un changement de sa résistance électrique. Cette variation est alors convertie en un signal mesurable, à des fréquences de l’ordre de quelques gigahertz. Résultat marquant : le dispositif fournit un signal environ cinquante fois plus intense que celui obtenu avec la méthode inductive classique, pour une surface de détection comparable. De quoi démontrer l’efficacité du GMR pour sonder les ondes de spin à très haute fréquence et à l’échelle nanométrique.
Ces observations expérimentales ont été confirmées par des simulations numériques, qui reproduisent fidèlement les résultats. Et l’équipe voit déjà plus loin : en recourant à des capteurs encore plus sensibles, comme ceux basés sur la magnéto-résistance tunnel (TMR), le signal pourrait être amplifié davantage. À terme, cette avancée ouvre la voie à des capteurs d’ondes de spin ultra-compacts, capables d’opérer dans des régimes extrêmes — sous les 100 nanomètres ou même avec des ondes générées par les fluctuations thermiques. Elle rapproche aussi la magnonique de son intégration dans les circuits électroniques conventionnels, ouvrant la perspective de nouvelles architectures plus rapides et moins énergivores.